27/06/2013
Ecrit en filigrane...
Photo « venue » du Web.
Avez-vous déjà observé un filigrane ? C’est beaucoup plus qu’un papier et pourtant, si vous le regardez distraitement, il n’est que blanc, une simple feuille comme toutes les autres…
Mais si vous l’examinez attentivement, à contrejour, il dévoile son secret et vous révèle des dessins surprenants, des silhouettes impensables, des images qui vous avaient échappé au premier regard.
Je suis ainsi.
Si vous me jetez un coup d’œil en passant, vous ne verrez que bien peu.
Mais si vous prenez le temps de me scruter, d’approfondir votre vision à la lumière, vous trouverez mes mots cachés, enroulés comme des cheveux, mes histoires entremêlées les unes aux autres, fausses paraissant vraies, vraies semblant fausses. Et même des mondes que vous ne pensiez jamais explorer.
L’écriture, c’est cela.
Un filigrane, ce n’est qu’un masque. Un très beau masque. Un masque vénitien.
Et dessous, il y a la peau. Celle qui crie son plain-chant.
Celle qui aime…
23:58 Écrit par AURORA dans Amour, Ecriture, Fiction, Journal intime, Poésie, Réflexions | Tags : poésie, poème en prose, écriture, fiction, réalité, filigrane, masque, venise | Lien permanent | Commentaires (1)
17/06/2013
La poche trouée.
Photo © Simone Navarra.
Il prend d’elle chaque chose, il lui dérobe chacun de ses trésors et il les place là, dans sa poche droite, celle qui a un trou et que par négligence, il n’a jamais réparée. Et sa douceur, et ses sourires, et son amour tombent par terre avec quelques pièces de monnaie si légères qu’il ne s’aperçoit de rien. Ça n’a pas d’importance. Il croit toujours qu’il en trouvera de meilleurs.
01:51 Écrit par AURORA dans Amour, Fiction, Photographes, Poésie | Tags : amour, fiction, poésie, poème en prose, photographie, photographes, simone navarra | Lien permanent | Commentaires (1)
15/05/2013
Ils appellent ça un accident.
Photo « venue » du Web.
Ce qui trompe le plus, ce sont les points de référence.
Prenez une route par exemple. Vous la connaissez pas cœur. Vous l’avez faite mille fois. Vous vous souvenez de chaque panneau, de chaque virage, des pâtés de maisons qui la bordent. A 11 heures, le soleil est exactement là où il doit être et à 21 heures, il a - comme il se doit - disparu à l’horizon. Ce sont ces certitudes qui nous induisent en erreur. Leur présence est implacable, elle distrait notre concentration et nous rend imprudents. Rien ne détourne plus de la réalité que les objets qui se trouvent là précisément où ils doivent se trouver, là où nous attendons qu’ils se trouvent. Irremplaçables. Si l'un d'entre eux n'y était pas, il serait le signe. Fatidique. Le gri-gri de protection suprême. Mais ils ne font jamais défaut. Ce sont eux qui nous endorment et ne nous permettent pas de voir le nouveau panneau qui marque des travaux commencés le jour même. Et nous basculons dans le précipice, hébétés.
Par contre, si quelqu’un d'habituel et non plus quelque chose vient soudain à manquer, nous avons une toute autre réaction : nous croyons que nous pourrons les remplacer, en avoir de nouveaux, tout neufs, comme l’enfant qui espère l'échange du jouet cassé. Mais c’est tout aussi dangereux d'y croire que de ne pas noter le panneau de signalisation posé ce matin. L’absence de quelqu’un est le vrai présage et si nous ne lui accordons pas notre attention, « nous descendrons dans le gouffre muets », comme l’a écrit Pavese.
19:27 Écrit par AURORA dans Amour, Fiction, Poésie, Réflexions, Société | Tags : poésie, réflexion, fiction, société, cesare pavese | Lien permanent | Commentaires (5)
17/04/2013
La Dame Aux Pieds Nus.
Photographie : Modèle AvonelleDryad - Photographe: Eclectic-Vision
Elle court dans le crépuscule,
La dame aux pieds nus,
Spectre d’organza,
Femme de tempêtes,
Epouse des marées,
Elle porte avec elle
Des ouragans
Par les sentiers.
D’un pas alerte,
Ballerine blanche,
La rescapée des abîmes
Se nourrit de feuilles.
Elle arrive au fleuve
Et d’antiques prières,
Elle exhorte les déesses,
Les fées des eaux.
Au fleuve elle cède
Son cœur furieux,
Son cœur de cobalt
Contre un lit de plumes.
Légère et spectrale,
La dame aux pieds nus
S’endort et abandonne
Ses douleurs anciennes.
Que le fleuve les noie,
Que le fleuve la garde
Et protège ses rêves
Enveloppés de soie.
Pour que demain, à l’aube,
Enveloppée de soi,
La dame aux pieds nus
Ne pleure jamais plus.
23:03 Écrit par AURORA dans Amour, Fiction, Photographes, Photographie, Poésie | Tags : poésie, gothique, photographie, avonelledryad, modèle, eclectic-vision, photographe | Lien permanent | Commentaires (3)
12/04/2013
Ma fierté et ma dignité ne tiennent pas dans un carton d'oubli...
Tableau © Vittorio Polidori.
Ce que tu fais de moi, ce que tu crois de toi…ne me convient pas.
Tu te places bien plus haut que tu n’es et tu en arrives à vouloir m’ignorer ou - pire encore - me cataloguer et me ranger dans un coin poussiéreux pour m’y oublier. Profits et pertes ? Comme tu te trompes ! Comme tu me connais mal ! Je suis l’alizée. Il suffirait de peu maintenant pour que je m’envole.
Il y a des pièces dans ton esprit où tu voudrais m’enfermer mais elles sont par trop étroites, je n’y entre vraiment pas ni physiquement ni moralement : je m’en évade comme une anguille. Il ne manquerait guère (ou guerre) pour que je sois déjà hors de tes murs, hors de tes mains. Retiens-le bien car ce n’est pas moi que tu retiendras si je décide de m’enfuir.
Il est inutile que tu hurles, que tu essayes de me culpabiliser ou que tu pousses et tentes de me forcer là dedans: je me battrai comme une lionne pour t’en empêcher.
Ne me nomme pas « invasive ». Tu aurais bonne mine si, semblable à un parfum volatil, je choisissais soudainement de changer de flacon et de devenir « transvasive ».
Si tu veux que je ne fasse pas d’histoires, trouve-moi un endroit plus confortable et digne de ce que je suis. Ne perds pas de vue une seule seconde qui je suis. Une femelle cobra. Toi, tu ne le sais plus, mais tous les autres pourraient te le dire : je glisse et ... oops… je ne suis plus là.
Et surtout, prends en compte que ma fierté, ma dignité me rendent aussi visible et précieuse qu’une contrebasse que tu porterais avec toi dans un train.
Ne me malmène pas, n'utilise pas un ton ou des mots blessants, sinon je ne jouerai jamais plus aucun air pour toi.
03:15 Écrit par AURORA dans Amour, Fiction, Peintres, Peinture, Poésie | Tags : amour, poésie, fierté, dignité, parfum, peintre, peinture, vittorio polidori | Lien permanent | Commentaires (2)
07/04/2013
Souffrance.
« Souffrance » (« Sofferenza ») © Elisabetta Gulino.
Ce soir, Madame Fleur Fanée laisse danser mélancoliquement ses doigts dans la rouille de ses cheveux. Elle pense à la jeune fille qu’elle fut, à une maison trop loin et vendue désormais, à la fenêtre d’une chambre fermée par les sceaux du temps. Elle entend chanter des illusions, des échos de ritournelles enfantines, des comptines, des fables, des boîtes à musique. Elle distingue le vent dans les figuiers, les oiseaux nocturnes. Elle se rappelle le goût du bonheur lorsque tout est encore vierge et entier devant soi.
Mais le temps passe… Et il n’y a rien dans cette nuit d’avril. Rien.
Elle est seule. Elle n'est pas coupable mais certains savent punir et seulement punir. Punir pour leurs fautes à eux. C’est tellement facile de faire souffrir quelqu’un et comme cela soulage ! C’est si confortable le silence, l’indifférence, l'injustice, la méchanceté, les mensonges, la lâcheté… Cela évite de se poser des questions, de réfléchir à son propre comportement, à ses pourquoi, à ses comment...
Profondément commode. Aussi douillet qu'un bon fauteuil.
Jamais discuter, jamais s’expliquer. Des téléphones coupés qui tuent à petit feu. Toujours la même fin de non répondre.
Ce soir, le son que Madame Fleur Fanée reconnaît n’est plus celui du vent dans les figuiers mais un autre que les années récentes lui ont appris : les trois coups du gel qui frappe à la porte, le gel qui tue le printemps, le gel qui glace son cœur et qui fait entrer dans ses yeux un éclat du miroir brisé de la Reine des Neiges.
Elle n’a même plus les larmes pour pleurer et le chasser. Elle est seulement dévastée, ravagée.
Cette nuit, comme bien d’autres nuits déjà, Madame Fleur Fanée ne connaîtra pas le repos.
Elle ne dormira pas.
03:16 Écrit par AURORA dans Amour, Fiction, Poésie | Tags : souffrance, poésie, amour, fiction | Lien permanent | Commentaires (1)
04/04/2013
"L'étoile de mer" ou "Divagations fictives autour d'une photographie de Man Ray".
Photographie « Mains » ou encore « Etoile de mer » - Man Ray - 1928.
Le Tout. Le tout peut se réduire à « Moins que tout ». Le moins que tout peut se réduire à « Tu étais tout pour moi ». Le tu étais tout pour moi peut se réduire à « Si tu avais fait ceci, si tu avais dit cela, alors peut-être tu serais resté tout pour moi ». Le si tu avais fait ceci, si tu avais dit cela, alors peut-être tu serais resté tout pour moi peut se réduire à « Il est difficile d’accepter ces mots ». Le il est difficile d’accepter ces mots peut se réduire à « Deux mains qui se séparent et une étoile de mer qui s’en retourne à l’eau ». Le deux mains qui se séparent et une étoile de mer qui s’en retourne à l’eau peut se réduire au « Silence qui suit un éloignement ». Le silence qui suit un éloignement peut se réduire à « L’un des deux ne s’est pas éloigné de beaucoup ; l’autre, si ». Le l’un des deux ne s’est pas éloigné de beaucoup ; l’autre, si peut se réduire à « Celui qui ne s’était pas éloigné de beaucoup s’habitue à l’idée que l’éloignement est bien plus fort qu’il ne le croyait ». Le celui qui ne s’était pas éloigné de beaucoup s’habitue à l’idée que l’éloignement est bien plus fort qu’il ne le croyait peut se réduire à « Je ne te verrai plus très souvent ». Le je ne te verrai plus très souvent peut se réduire à « Je ne te verrai presque jamais ». Le je ne te verrai presque jamais peut se réduire à « Je pense à d’autres choses ». Le je pense à d’autres choses peut se réduire à « J’ai de nouvelles envies, aller pêcher les étoiles de mer par exemple ». Le j’ai de nouvelles envies, aller pêcher les étoiles de mer par exemple peut se réduire à une idée fixe. L’idée fixe devient un tout. Le Tout.
19:11 Écrit par AURORA dans Amour, Fiction, Photographes, Photographie, Poésie | Tags : fiction, amour, poésie, photographie, man ray, mains, etoile de mer | Lien permanent | Commentaires (2)